J'ai déjà ouvert un post où j'avais poster qqs uns de mes textes me semble-t-il mais je ne sais pas où il est passé
J'ouvre celui là pour vous faire part de ma dernière création, qui est certainement loin d'être finie, mais que j'avais envie de faire lire.
Bonne lecture...
Ampevri entra dans la pièce. Ses yeux d’ambre parcoururent la salle. Sur les bancs étaient assises de nombreuses personnes qui l’observaient, qui avec un regard assassin, qui avec un air de victoire. Une femme s’effondra en larmes à son apparition et cacha sa tête dans les bras de son voisin. Il la reconnaissait, il les connaissait tous, il les avait vu dormir, immobiles, fragiles, insouciants, il les avait tous humé, mais leur tour n’était pas arrivé et il avait souvent changé de chambre pour trouver ce qu’il cherchait. Là encore, il sentait leur odeur, emplie de tristesse, de sentiment d’injustice, de désir de vengeance, mais aussi de méfiance et de crainte. Mais rien ne l’atteignait, plus il avançait dans l’allée centrale, plus il trouvait ce surplus d’émotions écœurant. Il arriva enfin au bout de l’allée. En face de lui trônait le juge, caché derrière un immense bureau en bois.
Lorsqu’il fut installé à la barre entouré de 2 mastodontes en costume noir, prêt à lui sauter dessus au moindre faux mouvement, le juge entama une longue litanie afin de remémorer à tous la raison de sa présence dans ce tribunal.
Ampevri se souvenait… Par cette nuit d’été où aucun nuage n’assombrissait le ciel, la lune ronde et pleine émettait une lumière blanche qui éclairait tout. Ampevri aimait cette époque de l’année car il faisait bon et les hommes laissaient leurs fenêtres ouvertes pendant la nuit. Rien n’était alors plus simple pour lui d’entrer sans se faire remarquer. Comme souvent, il avait faim, ce qui l’avait fait sortir de sa torpeur nocturne. Il avait volé plusieurs kilomètres humant avec attention chacune des odeurs qui se mêlaient au parfum de la nuit. Il s’était arrêté devant cette belle maison où le liseron parcourait les murs. Une odeur fraîche s’en dégageait par une fenêtre grande ouverte. Les rideaux de nacre de la pièce volaient, agités par le doux souffle du vent. Au milieu de la chambre délicatement aménagée se tenait un grand lit et, parmi les draps désordonnés, dormait une petite fille dont émanait une odeur de pureté et d’innocence à laquelle Ampevri n’avait pas pu résister. Il s’était approché de son pas feutré et léger, s’était penché et avait encore humé ce doux parfum qui l’enivrait et faisait monter en lui la sauvagerie de ses ancêtres. C’est alors qu’il avait enfoncé ses crocs d’une blancheur éclatante dans la peau fine et tendre du coup dénudé. Le sang avait coulé dans sa gorge, lui procurant une sensation d’euphorie. Tout son corps s’était mis à frémir. Il aspirait une vie, mais se sentait revivre et savait que ce sacrifice était indispensable. Il avait de toute manière construit sa vie sur ce principe : il fallait qu’il tue pour vivre.
Son larcin accomplit, il avait regagné son antre, s’était replié sur lui-même, s’enfonçant au plus profond des ténèbres afin d’échapper à la clarté du jour qui immanquablement lui brulait la chair…
Le juge continuait d’énumérer les nombreuses affaires auxquelles Ampevri avait contribué.
Il se souvint du paysan au gout moribond. Il n’était pas venu pour lui à l’origine, mais pour son bétail. Ses repas se devaient d’être variés, et bien qu’il préfère de loin la chair humaine pour tout ce qu’elle dégageait lorsqu’il la goutait, il était obligé de s’abaisser à attaquer des animaux primitifs au cuir dur et fade. Il était entré dans la grange malodorante et avait jeté son dévolu sur une ruminante endormie, mais alors qu’il s’apprêtait à la mordre, il avait entendu un bruit sourd dans le foin. La tête d’un jeune homme crasseux émergeait parmi les épis. Rien en lui ne témoignait d’une quelconque intelligence, de son odeur bestiale jusqu’à son esprit si peu développé qu’Ampevri l’avait pris pour celui d’une vache. Il vit les yeux vides du jeune homme le fixer d’un air d’incompréhension. Il n’était pas méchant et n’aurait probablement pas pu rendre compte avec conviction de ce qu’il avait vu ce soir là, mais Ampevri ne pouvait pas prendre le risque de laisser derrière lui une personne qui aurait pu l’identifier, aussi peu évoluée soit elle. Avec détermination, il s’était donc approché calmement du garçon qui n’avait pas bougé, impressionné par la prestance de l’être qui se tenait devant lui. Il s’était penché comme pour lui murmurer un secret et avait planté ses crocs dans la jugulaire. Le jeune homme s’était éteint sans broncher et n’avait opposé aucune résistance, incapable de comprendre ce qui lui arrivait. Ampevri était parti, un gout terne dans la bouche, dépité par ce repas improvisé et sans saveur.
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